La caldeira de Santorin est un lieu unique au monde… ce qui explique sans doute que des visiteurs du monde entier se pressent toute l’année dans le blanc dédale des ruelles d’Oia ou sur des caïques qui traversent le cratère inondé et font halte sur les résurgences du volcan.
Pas de saison morte à Santorin. Des bus qui parcourent l’île à toute allure, des grappes de touristes qui suivent leur guide et son petit drapeau dressé, des appareils photos ou plus souvent des smartphones tendus sur des perches attendant des heures à l’avance la descente du soleil sur l’horizon, des prix qui s’envolent et des boutiques de luxe, des mariés qui font la queue leu-leu en robe-meringuée et pantalon à pince pour une photo de noce inoubliable, d’énormes paquebots de croisière qui se déchargent en petites navettes régulières sur les 3 ports de l’île, des panneaux indiquant clairement les points de vue imprenables sur le « Sunset », des souvenirs pour tous les goûts, du vin sucré produit sur l’île, des rues piétonnes où l’on doit céder le passage à des groupes entiers qui viennent se selfiser dans des positions parfois douteuses devant ce cadre incroyable dès potron-minet et jusqu’au bout de la nuit…
Et nous, nous nous sommes mêlés à la foule.
Après la douceur de vivre de Naxos, le ton est immédiatement donné à la descente du Ferry où nous attendons comme les autres que le flot des touristes débarque puis rembarque dans des bus qui les mènent par l’unique route en lacet, embouteillée à chaque arrivée de bateau, jusqu’à leur hôtel. Le notre est plutôt bas de gamme et loin des lieux qui nous intéressent, mais tout est relatif sur une île qui se traverse de part en part en 1 heure ! Alors nous jouons le jeu des touristes que nous sommes, et cela vaut le coup, avouons le !
Levés à 7 heures pour prendre une navette puis un bus jusqu’au port principal de Santorin. Accueillis par notre guide grecque qui parle anglais, allemand et espagnol, nous attendons qu’une centaine de personnes embarque avec nous sur la caïque, voiles roulées et moteur en marche, pour notre première escale sur le volcan. Point de vue imprenable sur les roches rouges, ocres et blanches qui tombent en falaise dans la mer, surmontées de petites maisons blanches comme des franges de neige dans ce décor tout en contrastes. Sur le volcan, nous marchons sous le soleil brûlant dans les sentiers de lave noire aménagés par les géologues et la municipalité pour humer les fumerolles de gaz et apprendre l’histoire mythique, historique et géologique de cette île. Imaginer qu’il s’agissait, il y a plus de 1500 ans, d’une seule et même île ronde et verte où vivait une communauté minoéenne florissante demande un petit effort d’imagination. La désolation qui suivi l’éruption gigantesque du volcan insoupçonné sous l’île, la vague immense qui monta à plus de 200 mètres au-dessus du sol, l’effondrement du cratère qui donna à l’île sa forme actuelle (ou presque, le cratère étant réapparu à la suite de nouvelles éruptions plus tardives, jusqu’à la dernière en 1950), la nuit et l’hiver qui s’abattirent sur la région (jusqu’en Crète!) pendant près de 2 ans et qui causèrent l’extinction de la civilisation qui habitait Santorin et ses environs… vaut bien de croire qu’elle fut à l’origine du mythe de l’Atlantide. Aujourd’hui, le volcan est toujours actif et très surveillé. Des séismes secouent quotidiennement l’île, mais sans que l’on s’en rende compte. Le dernier tremblement de terre meurtrier eut lieu en 1956, une conséquence sans doute de l’éruption de 1950. Les habitations ayant le mieux survécu étant les maison troglodytes, naturellement anti-sismiques.
Vers midi, nous reprenons la caïque pour faire une halte près d’une zone d’eau de mer chaude, ferreuse, jaunie et réchauffée par les émanations du volcan en activité. Toute la famille saute à l’eau pour s’y baigner et profiter des bienfaits de cette eau pour les articulations… Étrange baignoire pour les dieux, où les bateaux ne peuvent accoster, et malgré tout colonisée par les touristes parlant un anglais du monde entier. Près de la source chaude, une poule cherche de quoi manger et des chèvres escaladent les parois noires du volcan.
Le pique-nique se fait sur la petite île de Thirassia, séparée de Santorin lors de la formation de la caldeira. Nous montons à pied, sous le soleil qui finit de nous dorer la peau, les 150 marches pour arriver en haut de la falaise, dans un village abandonné sauf des chats et de quelques restaurants panoramiques. La vue est en effet majestueuse ! Nous regagnons la caïque presque en courant pour le clou de la ballade. Ernest jette quelques galets dans l’eau incroyablement cristalline en attendant le départ. Après une dernière traversée de la caldeira, nous débarquons dans le petit port de Oia (prononcer « Ia »). Ernest et Solal choisissent de monter en âne, moyen de locomotion apprécié lorsque plus de 500 marches sont à gravir pour venir à bout de la falaise ! Ils nous attendent en pleine forme quand nous les rejoignons le souffle court, les joues brûlantes, le front mouillé… mais quelle récompense que le spectacle offert par le site ! Ici tout semble beau, la vue, les maisons, le soleil sur la mer d’huile. En faisant abstraction du fait que nous ne sommes pas seuls, nous apprécions l’une des petites villes les plus typiquement grecques, avec ses murs blanchis à la chaux, ses églises orthodoxes aux dômes bleus, ses escaliers et ruelles tortueux. Rencontre surprenante avec une petite librairie polyglotte. Glace et maïs grillé. Et bien sûr : coucher de soleil !! Nous rentrons la nuit venue, fermant les yeux dans le car pour ne pas avoir peur de la conduite à la grecque, et bien contents de pouvoir mettre au calme toutes les expériences et images emmagasinées dans la journée…
Le lendemain, nous passons une dernière journée, où nous pouvons constater que le tourisme, même de masse, peut s’exercer de différentes façons… Nous commençons par la visite du site d’Akrotiri, où des archéologues travaillent sous nos yeux à exhumer les ruines d’une cité engloutie par l’éruption volcanique, sorte de Pompéi grecque. Comme le constate le Guide du routard, guide moins onéreux pour les touristes que nous sommes, il manque quelques explications pour que nous puissions imaginer vraiment comment fonctionnait cette cité… Nous allons donc nous rafraîchir à la plage voisine, la Red Beach, nommée ainsi à cause de la couleur des falaises qui la dominent. Rencontre avec Marleen, venue de Londres et que nous aidons à franchir le chemin accidenté pour accéder à la plage. Échappée de son groupe, elle a décidé de venir seule jusque là, lassée de la piscine de son hôtel, de l’attentisme de ses congénères et du manque d’aventures… Nous découvrons ensemble la mini-plage de sable noir qui donne immédiatement sur une langue de gros galets difficiles à pénétrer, nous profitons ensemble de la mer chaude et de son décor unique de pierres rouges. Puis nous quittons Marleen pour visiter Thira (prononcer Fira), capitale de l’île dominant la caldeira, et son musée archéologique dans lequel nous découvrons les pièces magnifiques extraites du site d’Akrotiri, visité le matin. Souvenir inoubliable de ce petit musée où nous sommes absolument seuls et où se livrent à nous des splendeurs de plusieurs siècles, fresques murales, vases et vaisselle… Une gardienne de musée éclate de rire et tient à nous faire partager une blague qu’elle vient de lire sur Facebook tandis que l’autre se racle la gorge en faisant les cents pas, le regard féroce et la bouche tordue… À Thira aussi, rencontre d’une sympathique famille Suisse qui explore les îles grecques sac au dos, appréciant les points de vue, les marches escarpées et les ballades. Surprise de se rendre compte que ni eux ni Marleen ne savaient que Santorin était une île volcanique qui valait son caractère si unique aux poussées de magma et aux tremblements de terre !
À chacun son tourisme…
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